En Italie, une pratique qui reste l’exception.

 

Dario Franceschini, ministre italien des Biens culturels, a mis le mois dernier le feu aux poudres en parlant d’introduire un billet payant à l’entrée du Panthéon, le monument romain le plus visité avec le Colisée : il reçoit 7,4 millions de touristes par an. Le ministre écornait un principe de gratuité bien établi dans la tradition ecclésiastique italienne. Certes, le temple érigé par Agrippa en 27 avant J.-C. est un temple antique, devenu au siècle dernier le tombeau des rois d’Italie. Mais il a été christianisé en 609 de notre ère sous le nom de Sainte-Marie-des-Martyrs par le pape Boniface IV et sert encore aujourd’hui de lieu de culte.Intérêt artistiqueEn 2012, le Vatican a décidé de ne pas faire payer l’entrée dans les églises ou basiliques de la capitale. On peut donc librement accéder à Saint-Pierre, Saint-Paul-hors-lesMurs, Saint-Jean-de-Latran ou Saint-Louis-des-Français. Même s’il faut verser une obole de 2 euros (et 5 euros pour le catalogue) pour accéder au Musée du Trésor ou emprunter l’escalier des Papes érigé par le Bernin à Sainte-Marie-Majeure, l’accès à la nef reste libre pour les fidèles comme pour les touristes.En fait le Conseil pontifical pour les Biens culturels s’est gardé de trancher et a laissé chaque évêque instaurer ou non un ticket modique à l’entrée des lieux de culte ayant un intérêt artistique. Les entrées payantes restent l’exception dans le patrimoine religieux d’Italie et sont réservées aux monuments les plus prestigieux. Seulement 75 édifices imposent un droit d’entrée, sur un total de 64413. Les plus nombreux se situent dans les villes d’art et concernent des lieux très fréquentés par les touristes: les cathédrales de Milan, Sienne, Orvieto, Syracuse, Monreale. À Florence, il faut acheter un billet pour la cathédrale Santa Maria del Fiore et les églises de Santa Maria Novella, Santa Croce et San Lorenzo. Idem pour la cathédrale de Vérone et les églises de San Zano, Santa Anastasia et San Fermo ainsi que pour seize églises vénitiennes. À Arezzo, une bataille s’est déroulée pour la basilique San Francesco avec ses magnifiques fresques de la Vraie Croix signées Piero della Francesca. Les frères mineurs chargés du lieu sacré s’étant plaints des difficultés d’accès, le ministère a confié à une société externe la gestion de la basilique qui fait officiellement partie du domaine public.Pour Valerio Pennasso, directeur de l’Office national des biens culturels ecclésiastiques de la Conférence épiscopale italienne (CEI), « les églises et cathédrales ont pour vocation première d’être pour les communautés ecclésiales des lieux de recueillement et de prière. Leur première fonction est donc pastorale». La CEI prévoyait dans sa note de 2012 la possibilité de faire payer les entrées « dans les églises ayant une grande signification historique et artistique, et intéressée par des flux touristiques importants ».En outre, l’instauration d’un billet a une fonction éducative : « Faire comprendre au visiteur que l’entretien de l’église a un coût et qu’elle doit être respectée », souligne Domenica Primerano, directrice du Musée diocésain de Trente. Timothy Verdon, directeur du Museo dell’Opera del Duomo à Florence, relève que le billet «est une invitation à bien se comporter » : « Les visiteurs, en ayant le sentiment de se trouver dans un musée, sont d’autant plus respectueux qu’ils sont davantage indisciplinés dans les églises. »
Le Figaro.