Le changement commence par les élections départementales ! ” A quatre jours du second tour, Nicolas Sarkozy s’est rendu dans le Nord, mercredi 25 mars, pour renforcer la mobilisation en faveur de son parti. Le département n’a pas été choisi par hasard : il symbolise la déroute de la gauche au premier tour. Dans un de ses bastions historiques, le PS a déjà perdu, dimanche, 27 cantons sur 41. ” Dans certains endroits, la gauche n’est plus présente au second tour et laisse la droite en duel avec le FN : du jamais-vu ! “, s’étonne Marc-Philippe Daubresse, député UMP du Nord.
Le bloc UMP-UDI s’est qualifié dans 28 cantons, contre 37 pour le FN. La bataille pour la présidence se jouera donc exclusivement entre la droite et l’extrême droite. ” C‘est une chance historique que ce département ne soit plus dirigé par le PS et change de majorité “, a souligné M. Sarkozy, mercredi, à la sortie d’une visite de l’usine de boulonnerie Beck Crespel, à Armentières. Cette première visite d’usine depuis qu’il a effectué son retour en politique est censée, selon son entourage, ” symboliser le retour de M. Sarkozy auprès du monde ouvrier “.
Celui qui cherche à reconquérir l’électorat populaire n’a qu’une priorité : contenir la progression du FN pour que se forme la vague bleue dont il rêve. Dans la soirée, M. Sarkozy a tenu un meeting à Halluin, une commune de la métropole lilloise où le FN risque de gagner le canton. Il a lancé un appel à la mobilisation en direction des Français ” qui souffrent “, ” sont en colère “ ou ont été ” déçus “ par ses cinq ans à l’Elysée : ” Si vous vous méfiez de nous, allez voter avec méfiance mais allez-y quand même. “
Usant de son habituel raccourci sur le supposé axe FN-PS, il a également mis en garde : ” Vous pouvez voter pour le FN mais à l’arrivée, cela aboutira à l’élection d’un élu socialiste de plus. “ Se projetant vers les élections régionales de décembre, il a enfin prévenu : ” Je ne veux pas que cette région si généreuse, qui croit au travail, au mérite et à l’hospitalité, ait la honte d’avoir Marine Le Pen à sa tête. “
Pour convaincre les près de 1 500 personnes présentes de ne pas céder aux sirènes frontistes, M. Sarkozy a suivi la même stratégie qu’il avait employée lors de sa campagne ultra-droitière de 2012 : s’opposer frontalement à Marine Le Pen, accusée d’avoir ” le même programme économique que Jean-Luc Mélenchon “, et avec laquelle il promet de n’accepter ” aucun accord “, tout en reprenant des thématiques traditionnelles de l’extrême droite.
” Assimilation “Le passage le plus applaudi de son discours a été sans conteste celui dans lequel il exposa son idée d’” assimilation “ pour les immigrés, un terme issu de l’histoire coloniale qui tranche avec celui d’intégration, jugé plus républicain : ” Les Français ne veulent pas changer le mode de vie, la langue ou la culture dont ils ont hérité car ils veulent les transmettre à leurs enfants. Ils sont prêts à accueillir ceux qui veulent l’être mais c’est à eux – les immigrés – de s’adapter et pas à nous de le faire. ” Pour M. Sarkozy, ” répondre au malaise de la ruralité “, où le FN prospère, suppose d’aborder les sujets identitaires, et non le chômage ou le pouvoir d’achat. ” On en a assez du communautarisme ! “, s’est-il ainsi emporté. Alors que sa prise de position contre les menus de substitution dans les cantines scolaires a été largement critiquée dans son parti ces derniers jours, le président de l’UMP a déclaré : ” Une société inquiète comme la société française, on l’apaise en faisant la même règle pour tous. “
Les conseillers de l’ancien chef de l’Etat sont persuadés que cette ligne très droitière reste la plus efficace pour séduire les électeurs FN, et pour donner des gages à la base militante de l’UMP dans l’optique de la primaire à droite pour la présidentielle de 2017. M. Sarkozy assume cette stratégie, qu’il a lui-même exposée à son auditoire : ” Je dois être le plus proche de votre réalité. Je veux que chaque personne présente ici se dise en partant : “Au fond, d’accord ou pas d’accord avec Sarkozy, au moins, il nous a donné l’impression qu’il connaissait notre vie”. “
Alexandre Lemarié