Le trône de fer, une libre transposition de l’écrit.

  

Les fans de ” Game of Thrones “, dans le monde entier, suivront cette cinquième saison simultanément

En quelques mots, résumons quarante heures de série. Au jeu des trônes, apparaît d’abord le roi de Westeros, Robert Barathéon. Succédant au roi fou d’une autre dynastie, il règne, puis meurt. S’annonce alors une guerre entre des prétendants au trône. Alliances, duperies, mésalliances, entre grandes familles ou en leur sein, vont apporter à ” Game of Thrones ” sa patine historico-politique. Relations intrafamiliales, trahisons et ruses pimenteront le tout de suspense au fil des tribulations des personnages, tour à tour attachants et rebutants.

C’est le plus souvent fort sombre : aucun politique, guerrier ou religieux ne saurait être assimilé ici à un héros positif, et les rapports entre puissances font autant place au calcul stratégique qu’à l’irrationnel. Cela dit, les atrocités de ” Game of Thrones ” sont-elles plus abominables et plus aberrantes que ce qui peut se passer actuellement en Afrique ou au Moyen-Orient ?

Saturé de folie et de fureur, de tortures et de tromperies, de sang et de sexe, ” Game of Thrones ” court après la puissance de l’écrit. Car un livre peut multiplier massacres, viols et créatures surnaturelles sans que l’on se détourne de la page, quand leur représentation visuelle, elle, se révèle beaucoup moins supportable.

Pari gagné

Dans sa saga littéraire A Song of Ice and Fire (dont le premier volume s’intitule A Game of Thrones), l’Américain George R. R.  Martin, en entremêlant une foultitude d’intrigues, de personnages et de lieux, crée une galaxie amusante à décrypter pour ses milliers de fans, très fins limiers. Mais les créateurs de la série, eux, David Benioff et D. B.  Weiss, avec George R. R.  Martin pour coscénariste jusqu’à la saison  4, avaient le double défi d’être à la hauteur de l’imaginaire visuel créé par l’écrit (ce à quoi ils sont parvenus magistralement), tout en simplifiant à l’extrême un monde apprécié pour son incommensurabilité…

Indubitablement, le pari est gagné, même si nombre de promesses induites par certaines lignes narratives sont loin d’être tenues (notamment le dérèglement climatique sur lequel s’ouvre la série, ou les capacités de la grande héroïne de la série, Daenerys Targaryen, de donner vie à un nouveau mode de gouvernement).

Pour l’écriture de cette saison-ci et des suivantes, les créateurs de ” Game of Thrones ” se retrouvent par ailleurs dans une drôle de posture. En effet, l’auteur américain n’a pour l’instant rédigé que cinq des sept volumes qu’il entend consacrer à cette saga commencée en  1996. Cinq volumes qui ont nourri les quatre saisons de sa transposition à l’écran. Ce qui signifie qu’à partir de cette saison  5 (et jusqu’à la fin, prévue en saison  7 ou en saison  8, rien n’est encore défini), la série doit devancer l’oeuvre originale…

Certes, les créateurs ont une idée de ce vers quoi George R. R.  Martin veut amener sa saga (il a d’ailleurs déposé, dans le coffre-fort d’une banque, ses intentions pour la fin), mais Benioff et Weiss sont dorénavant seuls face aux pulsions et calculs de leurs personnages ; d’autant que Martin se consacre, outre à l’écriture de sa saga, à une nouvelle série que lui a commandée HBO. Les deux tomes restant à écrire seront-ils influencés par les choix faits par les créateurs de la série ? Si oui, jusqu’à quel point ?

Pour éviter toute fuite ou tout piratage déflorant cette saison  5, HBO et ses chaînes partenaires en lanceront la diffusion à la même heure… américaine, soit 3  heures du matin en France, dans la nuit du dimanche  12 au lundi 13  avril (avec rediffusion en soirée). Comment la chaîne française concernée, OCS (du groupe Orange) parvient-elle à sous-titrer à l’avance une saison plus sécurisée que le Pentagone ?

” Il est certain que pour une série aussi attendue, c’est Fort Knox et la Maison Blanche réunis, il faut signer des tas de papiers de confidentialité,note Guillaume Jouhet, directeur général d’OCS. Pour le sous-titrage de ses productions, HBO a choisi le studio français Dubbing Brothers. Eux reçoivent le texte sans les images, pour la traduction, nous la vidéo, pour un calage quelques jours avant la diffusion. “

Tous les networks ou grands groupes américains font de même : chacun travaille avec une des quatre ou cinq entreprises officielles de traduction qui existent en France. ” Il va de soi que ce genre de diffusion simultanée au niveau mondial doit être préparé en amont, ajoute Guillaume Jouhet. Aucun problème technique, aucun retard ne sont permis.