Articolo tratto da Le Monde Par Antoine Albertini (Bastia, correspondant)
Depuis 1988, près de 700 personnes ont été assassinées dans l’île. Une violence qui touche toutes les franges de la société corse.
Des fantômes, on en croise presque à chaque coin de rue, sous les porches et dans les ruelles, au milieu des placettes et le long des avenues, près des squares – partout où ils sont tombés sous les balles, plus rarement sous les coups de couteau. Du nord au sud de Bastia, sur quelques kilomètres carrés, n’importe quel itinéraire mène sur leurs traces invisibles, n’importe quel parcours permet de se souvenir. À condition d’avoir une bonne mémoire : ils sont tellement nombreux.
Tout près de chez moi, Emmanuel Multeddo, un instituteur de CM2 sans histoires, a été foudroyé d’une balle en pleine poitrine dans la rue Sant’Angelo le 8 septembre 2008 alors qu’il s’apprêtait à faire cours à ses élèves. Quelques centaines de mètres plus loin, au milieu du boulevard Paoli, Jean Ribero est tombé le 7 octobre 1984. Onze ans plus tard, à deux pâtés de maisons, un commando a tendu une embuscade mortelle au militant nationaliste Pierre Albertini.